Préparation physique : sortir de la jungle et se focaliser sur ce qui compte

Frédéric Marcérou – 10/11/2021

Cet article aurait aussi pu s’intituler « Comment bien exercer sa profession quand on est préparateur physique ? » mais c’était un peu moins putaclic.

Vous avez dit jungle ?

Le raisonnement présenté aujourd’hui fait suite à ma réflexion sur le danger que représente l’application de recettes dans le domaine de l’entraînement (à lire ici). J’ai poussé cette réflexion un peu plus loin car je pense que la préparation physique, et surtout LE préparateur physique, est entrain de se perdre dans une jungle d’informations digitales et qu’il est de plus en plus sensible aux effets de mode.

« J’utilise cette méthode car X a dit qu’il l’utilisait dans sa dernière vidéo ».

Remplacez X par le nom d’un préparateur physique à +10K de followers sur Instagram ou YouTube.

Ce type de discours est assez courant à l’heure actuelle à cause de deux choses :

  • L’honnêteté intellectuelle du coach X est en chute libre, bafouée par le besoin de visibilité et la course à la notoriété. Découvrir un outil / protocole / système et en faire rapidement un article ou une vidéo sans l’avoir testé sur une population assez conséquente et variée pour en tirer de réelles conclusions est devenue monnaie courante. Ce « gavage » de posts sur les réseaux sociaux et ce « trop-plein » d’assurance desservent les entraîneurs en recherche d’information et entraînent le second point.
  • Engranger des informations pour devenir meilleur est une excellente démarche, tant que la capacité de discernement n’est pas altérée. L’aptitude à juger de l’intérêt d’un outil dans un contexte donné est primordiale pour faire les bons choix aux bons moments. La dernière trouvaille à la mode n’est pas toujours la panacée… elle l’est même rarement.

« X utilise un outil que je ne connais pas, je dois sûrement être en retard ».

J’ai souvent entendu cette phrase dans la bouche de jeunes entraîneurs, elle m’a toujours dérangé. Rien de mieux pour stresser et se dévaluer que de scroller son Instagram et de voir d’autres entraîneurs utiliser des outils que l’on ne maîtrise pas ou sur lesquels on n’a pas été formé. D’autant plus quand ces espèces de blaireaux vous disent qu’ils sont dans le futur et qu’ils dénigrent ceux qui ne suivent pas le mouvement.

Dans cette jungle d’informations, la prolifération des blogs du début des années 2010 est maintenant supplantée par celle des podcasts. Un bien pour un mal ? Mal pour un bien ? Je n’en sais rien. Mais je pense depuis le début que donner librement la parole à n’importe qui entraîne des dérives, surtout pour le jeune entraîneur qui débute, et je ne parle pas des nombreuses redites qui polluent les fils d’actualité.

Que celui ou celle qui n’a pas créé son article ou son podcast sur le squat lève la main…

…et que celui ou celle qui n’a pas interviewé l’entraîneur X précédemment cité dans son podcast lève les deux !

NB : Si cela peut vous rassurer mes deux mains sont en l’air, mais j’essaye depuis quelques années de proposer des choses différentes… comme cet article.

Fin du sketch, retour à la réflexion

Ce constat m’a poussé à me demander quelles sont les choses qui comptent réellement en préparation physique, au pire qui évitent de faire des erreurs, au mieux qui procurent des résultats positifs, et qui sont appliquées par les entraîneurs à succès… les vrais, ceux qui sont sur le terrain depuis plus de 20 ans sans changer de crêmerie tous les deux ans.

Avant de vous donner mon avis, prenez note que je ne me considère absolument pas comme un préparateur physique « à succès », des fois je fais bien mon métier, des fois non, mais exerçant cette profession depuis 14 ans, je pense pouvoir donner un avis qui vaudra la valeur que vous voudrez bien lui donner.

Donc à mon avis pour être un bon préparateur physique ce qui compte c’est de :

  • Maîtriser les bases de l’entraînement, et notamment les paramètres de séance en fonction de ce que l’on souhaite améliorer, tout en gardant à l’esprit que rien n’est gravé dans la roche.
  • Connaître le profil des athlètes que nous avons à charge pour adapter au mieux les paramètres de séance et le discours.
  • Être conscient des moyens mis à notre disposition (matériel, temporel, humain, financier) et de faire au mieux avec ce que l’on a.
  • Proposer quelque chose de cohérent en l’animant avec ses qualités et ses défauts, mais surtout avec passion.
  • Avoir une grosse éthique de travail : professionnalisme, droiture, honnêteté, ponctualité, savoir bien se placer dans les relations interindividuelles.
  • Être capable de s’adapter à la culture d’un sport, d’un club, et aux croyances des athlètes.
  • Être capable d’analyser les effets de l’entraînement et d’adapter les paramètres au quotidien pour continuer à faire progresser l’athlète en minimisant le risque de blessure.

J’ai la faiblesse de penser que si le préparateur physique maîtrise les points précédents à la perfection, il a de fortes chances d’intégrer le Top 1% des entraîneurs, et surtout, il est en capacité d’aider à progresser 99% des personnes qui ont pour but de performer dans une discipline sportive.

Pourquoi un tel %

Parce que les athlètes professionnels de haut niveau sont une infime part de la partie émergée de l’iceberg, et que les 99% restants n’ont pas besoin d’outils sophistiqués ou de méthodes révolutionnaires pour progresser. Bouger mieux et plus souvent avec un entraînement cadré s’avèrera bénéfique pour l’immense majorité des personnes, et parfois même à haut niveau !

Coach smart(er).